NCL : LE CYCLISME SE RÉINVENTE AUX ÉTATS-UNIS
Des critériums ultracourts,
des équipes mixtes, un système de points inédit, la NCL révolutionne un
cyclisme outre-Atlantique qui reprend du poil de la bête. La nouvelle ligue
incarne une nouvelle approche du vélo.
2023 a été un tournant pour le cyclisme américain. Les États-Unis sont redevenus une puissance mondiale. Grace aux exploits de Sepp Kuss, Neilson Powless, Matteo Jorgenson et Brandon McNulty, ils ont même gagné cinq places au classement UCI des nations et occupent désormais le dixième rang.
Sur leur sol aussi, les
Américains se sont réinventés. Ils ont créé la NCL (Nouvelle Ligue de
Cyclisme), sur le modèle de la NBA en basket. Le basketteur Kevin Durant a même
investi dans la ligue afin « d'apporter plus de visibilité au cyclisme »,
les résultats sont là.
Mixité et parité
Le système de courses est novateur. Pour la première édition, quinze équipes mixtes (huit coureurs, huit coureuses) se sont affrontées lors de trois épreuves disputées en format critérium avec une trentaine de tours d'un circuit d'environ deux kilomètres, à Miami, Denver et Atlanta.
Les points comptant pour le classement général étaient mis en jeu à chaque tour. Au terme des trois manches, un "prize money" d'un million de dollars a été attribué aux Miami Nights, l'équipe gagnante.
Les sprinters à la fête
7 des 16 coureurs des Miami Nights étaient latino-américains. Clever Martinez est l'un des pionniers de ce nouveau système. Le Vénézuélien a rejoint les États-Unis il y a trois ans, d'abord avec Rockland Cycling Velo, avant de mettre le cap sur la Floride et de rejoindre l'ambitieux projet NCL.
« Historiquement, celui qui remportait le critérium aux États-Unis était celui qui franchissait en premier la ligne dans le dernier tour, mais la NCL a changé les règles pour maintenir les spectateurs en haleine durant toute la course. Comme lors de l'épreuve du tempo sur piste, il y un sprint à chaque tour, celui qui passe en tête marque des points, et à la fin, celui qui en a le plus remporte la course », explique Clever Martinez. Le Vénézuélien précise que « trois coureurs inscrivent des points (3 ; 2 et 1 points) à chaque tour » tandis que lors du dernier « les dix premiers sont récompensés » (de 30 à 1 point, du vainqueur au dixième). Les scores de la course masculine et féminine sont additionnés.
« Grace au nouveau format à chaque tour, il y a de l'action. C'est plus dynamique pour le coureur et amusant pour le spectateur », s'enthousiasme le sprinter.
Justement, Clever Martinez trouve ces critériums taillés « pour les cyclistes rapides et explosifs ». La course ne se dispute pas à un rythme régulier. Il mentionne de « nombreux pics de vitesse ». D'après le Vénézuélien, les coureurs endurants sont cependant tout aussi essentiels dans une équipe pour « suivre chaque contre-attaque ». La cohésion et l'équilibre des équipes comptent aussi. « Nos principaux concurrents étaient les Denver Disruptors, une équipe plus forte, expérimentée et avec de plus grands noms » mais « moins axée sprint et pas aussi soudée »
Le show à l'américaine
Le divertissement est omniprésent, les manches de la NCL font partie d'un véritable spectacle. Pour Clever Martinez, on assiste à une « américanisation du vélo ». Les coureurs auront dés l'an prochain un numéro qui leur sera attribué et leur nom apparaîtra au dos du maillot pour permettre aux non-spécialistes de les différencier.
L'aspect marketing est très présent. « Beaucoup étaient sceptiques sur la NCL, pourtant l'affluence a été au rendez-vous » affirme l'ancien champion du Venezuela de poursuite. Si la dernière manche s'est disputée sur le circuit automobile de Porsche à Atlanta et que les places étaient payantes bien qu'historiquement le cyclisme est un sport gratuit, les spectateurs étaient nombreux. Les premières manches à Miami et Denver n'avaient en revanche pas de billetterie, même si certains fans pouvaient opter pour un pass VIP et ainsi avoir plus de proximité avec les coureurs et se restaurer sur place.
Le modèle économique de la Ligue est novateur. Les femmes gagnent exactement le même salaire que les hommes. Il y a une équité parfaite en termes de salaire et de matériel. Par ailleurs, les déplacements, les hôtels et la nourriture sont entièrement pris en charge par la ligue.
Entre sports collectifs et mécaniques
Clever Martinez souligne une autre nouveauté fondamentale de la NCL. Comme dans les sports collectifs, les remplacements sont possibles pendant la compétition. « Il y a toujours un coureur dans les stands qui peut en remplacer un autre ». Des coureurs frais peuvent ainsi entrer sur le circuit et remplacer leurs équipiers ayant déjà produit leur effort.
Les stands évoquent les sports mécaniques. Comme en Formule 1, la veille des courses, il y a des qualifications pour définir l'ordre de départ des équipes sur la grille. Ces qualifications se déroulent soient sur home trainer, soit en sprint lancé. Un coureur et une coureuse de chaque équipe s'affrontent individuellement, les vainqueurs de ces qualifications permettent à leur équipe de s'élancer en tête de grille et d'avoir un avantage certain en début de course. Un écart correspondant à quinze secondes sépare chaque équipe sur la grille.
Outre-Atlantique le cyclisme est à un tournant de son histoire. La deuxième édition de la NCL aura lieu en 2024. Les effectifs passeront de huit coureurs et coureuses à seulement cinq, cependant le nombre d'équipes participantes et de manches augmenteront largement.
AYMERIC PEZE